Plus que Mustafa Kemal lui-même, c'est son successeur İsmet İnönü,
qui a fortement encouragé un culte de la personnalité post mortem,
un culte qui a survécu jusqu'à ce jour :
le portrait d'Atatürk est partout, dans tous les bureaux de l'administration publique, les classes,
sur tous les billets de banques et dans les maisons de beaucoup de familles turques
qui le considèrent comme un héros national.
La Loi n° 5816, adoptée le 25 juillet 1951, stipule que
"Quiconque insulte publiquement ou maudit la mémoire d'Atatürk est incarcéré avec une lourde sentence
entre un et trois ans".
Sentence aggravée si la diffamation a lieu par voie de presse.
Dans ces conditions on comprend que la mémoire du grand homme soit constamment honorée.
Beaucoup de lieux portent son nom comme l'aéroport international d'Istanbul
ou le Stade Olympique Atatürk dans cette même ville.
Une ou plusieurs statues d'Atatürk se trouvent dans la plupart des villes de Turquie.
La première statue érigée à son nom date de 1926 et se trouve à Sarayburnu dans la ville d'Istanbul.
Chaque cour d'école en Turquie possède un buste d'Ataturk.
Tous les ans au moment exact de son décès, c'est-à-dire le 10 novembre à 9 h 05, les sirènes retentissent à travers tout le pays, deux minutes de silence sont observées, la diffusion audiovisuelle est interrompue pendant ces deux minutes.
Les drapeaux sont mis en berne pour cette journée.
Auparavant, la manifestation du deuil était plus marquée,
les journaux avaient des titres noirs, les cinémas, les restaurants restaient fermés ce jour-là.
Ces pratiques ont été abandonnées en 1989, pour mettre l'accent sur la commémoration plutôt que le deuil.
L'immense majorité des partis politiques se réclament de l'héritage kémaliste,
cependant les poussées extrémistes sont rapidement tentées de contester le mythe fondateur :
en ce sens celui-ci constitue un rempart historique qui s'est avéré efficace contre les dérives extrémistes.
« Objet d'un culte de la personnalité certainement unique dans une démocratie,
Atatürk a mis en place un système moderne pour les années 1930,
mais qui s'est complètement figé par la suite en mémoire du « chef éternel ». […]
Parallèlement, l'État kémaliste a mené un pays musulman de 70 millions d'habitants
vers la démocratie et la stabilité, ce qui est rare dans cette région du monde ;
il a également lutté avec succès pour la laïcité
et contre le développement trop important des mouvements islamistes[39]. »